Procédé de fabrication de bon fer en barres au moyen de la fonte contenant du phosphore (Verfahren aus phosphorhaltigem Roheisen gutes Stabeisen darzustellen)
Le procédé qui fait l'objet du brevet demandé par M. Scheerer repose sur l'emploi combiné des chlorures de sodium et de calcium, pour enlever à la fonte, pendant le puddlage, le phosphore qui nuirait à la qualité du fer produit. Il est vrai que ces deux chlorures ont déjà été, à différentes reprises, essayés isolément ou en combinaison avec des composés du manganèse, pour obtenir le résultat qu’a en vue le demandeur du brevet en question; mais tous ces essais ont échoué, parce que le chlorure de sodium, seul, est trop volatile, et le chlorure de calcium seul, trop peu efficace. L'emploi simultané des deux réactifs, proposé par M. Scheerer, nous semble devoir corriger les défauts de chacun d’eux et permettre d'utiliser leurs propriétés déphosphorisantes.
Il nous est impossible de nous prononcer sur un autre avantage du procédé, que mentionne la demande, celui de diminuer la durée du travail, et, par suite le déchet de la fonte au four à puddler; il est vrai que l'addition des deux agents chimiques rend les réactions plus intenses, et tend ainsi à diminuer la durée; mais, par contre ,cette addition, tant par elle-même que par l'action qu'elle doit avoir sur les parois du four, augmente la quantité de matière inerte dans les scories, et produit ainsi l'effet opposé. La pratique seule pourrait nous renseigner sur ce point; malheureusement nous ignorons si le procédé a été essayé dans le royaume de Saxe, où il a été breveté le 1er juillet 1870.
Ce dernier point est, d'ailleurs, d'une importance secondaire; l'avantage essentiel que le procédé Scheerer promet au Grand-Duché, et qui garantit pour ainsi dire la célébrité du savant professeur, est d’éloigner du fer le phosphore dont nos fontes renferment quelquefois 1½ pour cent. Aussi leur emploi était-il, jusqu'à ce jour, rendu impossible pour la fabrication des fers de bonne qualité, et fort restreint pour celle des fers de qualité ordinaire; on ne les employait que pour les fers de qualité inférieure.
Les inconvénients que présente la présence du phosphore, une fois écartés par un moyen aussi peu coûteux pour les fabricants de fer que celui proposé par M. Scheerer, non seulement la valeur des fontes du pays en serait augmentée et le débouché à l'étranger notablement agrandi, mais encore pourrait on espérer introduire la fabrication du fer dans le Grand-Duché, problème dont on s’est déjà beaucoup occupé et auquel l'invention de M. Scheerer, même si elle n'était pas aussi parfaite que le prétend l’inventeur, ne pourra manquer de faire faire un grand pas vers la solution.
En résumé, le procédé qui fait l'objet de la demande doit être considéré comme un procédé nouveau; il promet de grands avantages à une des principales industries du pays, celle de la fonte; il remplit donc les conditions requises pour l'obtention d'un brevet d'invention; enfin il fait entrevoir la possibilité de la création d'une industrie nouvelle, celle du fer; et pour que ce dernier résultat puisse être atteint, il nous semble indispensable de protéger par un brevet la propriété intellectuelle de l'inventeur; car de cette manière on associera les efforts de ce dernier à ceux de nos industriels, et l'on empêchera ceux-ci de suivre la voie toujours dangereuse des tâtonnements et des essais.
Nous croyons donc devoir prier la Chambre de commerce, dans l'intérêt de l'industrie du pays, de bien vouloir faire un accueil favorable à la demande de M. Scheerer, et d'inviter le gouvernement grand-ducal d'accorder au savant professeur le brevet demandé.
Cette invention promettant, d'après l'avis des experts, de grands avantages à l'une des principales industries du pays, l'assemblée prie le Gouvernement d'accorder le brevet demandé.
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(19/02/2021)