Appareil pour la fermentation de la bière dans des vases fermés
Nous avons le l'honneur de vous communiquer ci-joint avec le croquis et la description y annexées, une requête que le sieur Zimmer-Wurth, brasseur à Clausen, faubourg de Luxembourg, à présenté à Sa Majesté à l’effet d'obtenir gratis, et pour le terme de 15 années, un brevet pour l'importation d'un appareil propre à faire fermenter la bière dans une cuve hermétiquement fermée.
Nous vous prions de nous donner confidentiellement votre avis tant sur cette demande en elle-même, que sur la question de savoir jusqu'à quel point l’usage d'un semblable appareil peut se concilier avec l'exécution des lois et instructions en matière d'accises sur les boissons distillées.
Il convient d'abord et avant tout que vous invitiez le sieur Zimmer-Wurth à faire connaître la date et la durée du brevet d'invention qui a dû être accordé dans les provinces rhénanes pour l'appareil dont il s’agit.
Nous avons l'honneur de vous renvoyer ci-joint la requête que vous nous avez communiquée par bulletin du 6 du courant, et par laquelle le sieur Zimmer-Wurth, brasseur à Clausen, faubourg de Luxembourg, demande à obtenir gratis et pour un terme de 15 années, un brevet pour l'importation d'un appareil propre à faire fermenter la bière dans une cuve hermétiquement fermée.
En parcourant les dispositions de la loi du 25 janvier 1817 (n° 6 du journal officiel de la même année) relative à la concession de droits exclusifs pour l’invention, l'importation ou l'amélioration d'objets d’art ou de l’industrie, et le règlement du 26 mars suivant pour l'exécution de cette loi, nous avons cru reconnaître que l'intention du législateur a été de subordonner la délivrance de brevets d'importation, à l'existence à l'étranger de brevets d’invention pour les mêmes objets.
Or, il résulte du rapport de Monsieur le Directeur des contributions directes et de la lettre même du sieur Zimmer-Wurth qui se trouvent ci annexés, qu'il n'existe à l'étranger aucun brevet d'invention pour l'appareil en question, mais que celui-ci est le secret de deux propriétaires de brasserie dans les provinces rhénanes de la Prusse, qui en font usage à l'exclusion de tous autres.
Nous pensons dès lors que la demande du sieur Zimmer-Wurth n'est pas susceptible d'être accueillie.
J'ai l'honneur de vous transmettre de nouveau la requête par laquelle le sieur Zimmer-Wurth demande à obtenir gratis pour un terme de 15 années, un brevet pour l'exportation d'un appareil propre à faire faire fermenter la bière dans une cuve hermétiquement fermée, et que vous m'avez renvoyée par votre dépêche ci-émargée, en faisant observer, que je n'ai pu reconnaître, en examinant le règlement du 26 mars 1817, cité par vous, que l'intention du législateur ait été de subordonner la délivrance des brevets d'importation à l'existence à l'étranger des brevets d'invention pour les mêmes objets.
Ledit règlement renferme bien des dispositions à suivre au cas qu’un brevet à été accordé à l'étranger, mais il ne fait aucunement de l'existence d'un tel brevet la condition requise pour faire accueillir favorablement la demande en obtention d'un brevet d'importation dans notre pays [3].
Je vous prie, en conséquence, Messieurs, de vouloir traiter cette affaire conformément aux instructions existantes et, en me renvoyant la requête et les pièces annexées, et joindre encore un double du dessin et de la description, ainsi que le procès-verbal dont fait mention l'article 2 du règlement prénommé.
En réponse à votre dépêche … nous avons l'honneur de vous informer que nous ne possédons pas les moyens de donner un avis convenable sur la demande du sieur Zimmer-Wurth tendant à obtenir un brevet d'importation pour un appareil propre à la fabrication de la bière.
Jusqu'ici le rôle de l'administration provinciale se bornait aux formalités de réception et d'envoi mentionnées dans les articles 2 et 3 du règlement du 26 mars 1817. Le surplus des opérations étaient dans les attributions du ministère compétent.
Pour que l'administration grand-ducale puisse remplir l'office de ministère, il semble convenir qu'elle connaisse les instructions qui règlent la marche à suivre et qu'elle ait à sa disposition des aviseurs ___ en existe au ministère de l'intérieur, ou au moins des hommes de l’art spécialistes destinés à cet effet et responsables de leur ___. Ce n'est qu'après la solution de ces questions que nous nous croirons en état de faire un rapport sur la demande du sieur Zimmer-Wurth.
Si l'affaire de Monsieur Zimmer-Wurth était encore intacte les moyens à faire examiner l'appareil pour lequel il demande un brevet ne manqueraient pas; mais vous concevez, Messieurs, que dans l'état où elle se trouve maintenant après que vous avez ouvert l’enveloppe, qui renferme la description et le dessin, je ne puis plus faire usage de ces moyens. Aussi ne m’attendais-je pas à vous voir soulever les questions, mentionnées dans votre dépêche du 28 octobre dernier, après avoir déjà explicitement proposé le rejet de la demande.
Dans l'état actuel je ne vois d'autres moyen, de terminer l'affaire, que celui, de satisfaire à la demande, faite par ma lettre du 7 octobre n° 7, pour autant que vous y avez les moyens; le moment actuel paraissant peu convenable pour en créer de nouveaux.
Par votre lettre du premier de ce mois … vous nous faites observer que les pièces produites par le sieur Zimmer-Wurth ne se trouvent plus enveloppées comme elles l'étaient, vous ne pouvez plus faire usage des moyens que vous auriez eus de les faire vérifier.
Si la disparition du lien qui enveloppait ces pièces doit entraîner une telle difficulté, il nous importe de vous faire connaître que l'administration grand-ducale n'y est pour rien.
Lorsque ces pièces vous ont été renvoyées par notre lettre du 30 septembre dernier, elles étaient absolument intactes. Des précautions avaient été recommandées à ce sujet, et nous nous sommes apurés qu’elles étaient religieusement observées.
Mais ces mêmes pièces n'étaient pas jointes au second envoi que vous nous avez annoncé par votre dépêche du 7 octobre, n° 7; il a fallu les réclamer par une note envoyée à vos Bureaux, et ce n'est que le 18 octobre qu'elle nous sont parvenues avec la note que nous joignons à la présente.
Alors si les pièces se trouvaient réellement dans l'état que vous signalez dans votre dépêche du 1er septembre, et, si nous n'en avons rien dit dans la nôtre du 28 octobre, c'est que nous ne jugions pas à propos de vous entretenir d'un fait dont nous présumions que vous n’auriez pas manqué de parler vous-même le 7 octobre, s'il devait influer sur la manière de traiter l'affaire.
Si, nonobstant ces circonstances, vous persistez à penser que nous devons procéder à l'instruction qui doit précéder la décision à intervenir, nous le ferons par expertise établie dans le sens indiqué dans notre lettre précitée, du 28 octobre; seulement nous vous prions de vouloir bien nous communiquer les instructions nécessaires 1° pour mettre les experts à même de suivre la marche observée par les aviseurs du ministère de l'intérieur ; 2° pour savoir comment nous pourrons les faire payer.
Si, comme vous assurez, l'enveloppe qui renfermait la description et le dessin de l'invention pour laquelle le sieur Zimmer-Wurth sollicite un brevet d’introduction, était intacte, lors ce que ces pièces furent ajoutées à votre avis du 30 septembre dernier, n° 532, il faudrait, qu'elle ait été ouverte dans le trajet de Luxembourg à La Haye; car moi-même j'ai ouvert votre dit avis, comme j'ouvre toutes les pièces qui entrent, et j'ai pu par conséquent vérifier:
1° que l'enveloppe était ouverte et 2° que le cachet de l'enveloppe qui contenait votre avis susdit, auquel ces pièces se trouvaient annexées, ainsi que celle-ci même, n'étaient en aucune manière endommagés et ne montrent la moindre trace d'avoir été ouverts.
C'est une vérité, qu'il m'est impossible de mettre en harmonie avec l'assurance que vous me donnez. Vous vous convaincrez aussi de ce, que je viens d'avancer, que le retard, causé par un abus de l'expéditionnaire dans le retour des pièces en question, n'a pu influencer sur l'état de l'enveloppe, parce que le cachet en était déjà brisé.
En outre je trouve dans le rapport de Monsieur le Directeur des contributions, annexé à votre avis susmentionné, le passage suivant:
“En conséquence, quoi que l'on ne puisse contester l'utilité du moyen de perfectionnement que ce fabricant introduit dans les procédés de sa fabrication, et que l'emploi de l'appareil indiqué n’offre, du reste, aucun inconvénient sous le rapport de l'exécution des lois relatives à la perception de l’accise …”
Ces assertions supposent nécessairement une connaissance parfaite de l'appareil, qui paraît ne pouvoir être acquise que par l'inspection et l'examen du dessin et de la description renfermés dans l'enveloppe actuellement ouverte, ce qui s'accorderait très bien avec l'état où j'ai trouvé cette enveloppe lorsque que j’ouvrais votre dépêche du 30 septembre dernier.
Du reste, l'ouverture de l'enveloppe étant maintenant un fait consommé sur lequel on ne peut plus revenir, il ne reste que de faire remplir encore les formalités administratives voulue par les dispositions existantes, et je vous prie donc, d’y vouloir procéder en faisant en même temps à l'inventeur la remarque, que j'ai ajoutée par post-scriptum à ma lettre du 7 octobre dernier n° 7.
Pour ce, qui concerne l'examen technique de l'invention je me servirai des moyens que j'ai ici et vous pourrez vous en dispenser.
Dans les circonstances où se trouve le pays il semble que le Gouvernement pourrait ne pas se tenir rigoureusement à l'exécution de la loi sur la délivrance des brevets d’invention, en ce qui a rapport aux droits exigés pour les concessions de cette espèce. En effet ces droits fixés pour la délivrance d’un privilège de cette espèce étaient probablement calculés 1° sur l'importance de l’invention, 2° sur l'étendue des territoires sur lesquels il pouvait faire usage de ses privilèges et 3° peut-être encore sur le plus ou moins de moyens pécuniaires de l'intéressé.
Or le territoire sur lequel le sieur Zimmer pourrait faire usage de son privilège n'est pas le même que celui appliqué à cet effet par la loi précitée; ce droit se restreindrait au Grand-Duché tandis que la loi de 1817 l’a fait étendre pour tout le royaume des Pays-Bas. Encore le sieur Zimmer pourrait-il faire usage de son privilège, s'il l’obtenait, que sur le territoire du Grand-Duché où l'autorité légale est reconnue, et ce territoire est très restreint.
Cette considération serait peut-être de nature à déterminer le Gouvernement a supprimer ou réduire les droits fixés par la loi de 1817.
Mais avant qu'il ne puisse se résoudre à prendre cette résolution ou même à délibérer sur ce point, il paraît être nécessaire que le sieur Zimmer satisfit d'abord à tout ce qui est exigé à l'appui d'une demande en obtention de brevet et qu’il produise en conséquence les pièces que lui ont été demandées. Sans cela le Gouvernement ne serait pas à même de faire vérifier si l'importance de l'invention mérite la faveur de la réduction des droits, si tant est que cette considération entre pour quelque chose dans la fixation de ces mêmes droits; car quoique le Gouvernement serait à même de faire cette vérification sur les pièces déjà produites c'est l'effet des circonstances fortuites qui lui a procuré cette faculté: le bris des liens qui fermaient les plans et description. Suivant la lettre qui a été écrite au sieur Zimmer, celui-ci est forcé à croire que ces pièces sont encore cachetées, et comment s'y prendre pour les lui rendre dans l'état où elles se trouvent.
Dans tous les cas, il paraît que le sieur Zimmer doit être invité à fournir les pièces qui lui ont été réclamées. Alors, soit que le Gouvernement lui accorde ce privilège pour les conditions proposées par lui, soit qu'il le lui refuse, on pourra lui restituer tous les plans et dessins recachetés du sceau du Gouvernement. Le sieur Zimmer ne pourrait pas faire de remarque à cet égard, parce que le gouvernement a le droit d'examiner les pièces de cette nature avant de prendre une décision.
Après ces deux écrits dont Votre Excellence a bien voulu honorer le soussigné, il prend la respectueuse liberté de vous exposer:
Que vue l'exiguïté du territoire du Grand-Duché il a cru pouvoir être dispensé même du minimum de droits perçus ordinairement sur un brevet qu’on fait valoir pour toute la monarchie des Pays-Bas.
Cependant, le soussigné consentirait volontiers à payer ladite somme si le Gouvernement lui permettait de ne pas verser cette somme que lorsque le plat-pays serait rentré dans le régime légal et si le droit exclusif pendant ce statut-quo ne comptait nullement pour la durée du brevet.
En toute autre cas, le soussigné se voit forcé à prendre la résolution de pratiquer avec l'appareil dans un appartement qu'il tient sous clefs; et si le brevet pour tout le Grand-Duché seul ne pouvait être donné, sans ladite somme; alors le soussigné ose de prier Votre Excellence de bien vouloir lui faire retourner les plans et la description.
Conformément à votre dépêche du 19 septembre dernier nous avons l'honneur de vous renvoyer la requête …
Nous y joignons le complément des pièces requises à l’appui des demandes de cette espèce, pièces dont le pétitionnaire vient seulement de faire le dépôt et qui consistent en double plan, en un double, en langue allemande, de la description, et, en une déclaration rédigée sur papier timbré, dans le sens du n° 1 de l'arrêté royal du 17 août 1827, plus une expédition du procès-verbal constatant la remise de ces actes.
Vous remarquerez les raisons alléguées par le pétitionnaire pour obtenir 1° que le terme du brevet ne soit pas de moins de 10 ans, 2° que le droit soit fixé au minimum de 150 fl., 3° que le payement n’en soit exigible qu'à l'époque où tout le Grand-Duché sera rentré dans l'ordre légal.
Nous avons fait modifier cette dernière clause de manière à ce qu’à tout événement le déclarant soit tenu de payer le tiers du droit (50 fl.) à la délivrance même du brevet.
Nous pensons que les circonstances sont de nature à faire admettre la concession ??_____ et conditionnée dans la supposition que l'instrument dont il parle méritera le brevet qu'il sollicite.
Quant au passage de votre dépêche du 19 novembre concernant les premières pièces produites par Monsieur Zimmer-Wurth, nous ne nous pouvons que nous apurer que ces pièces sont parties d'ici dans l'état où elles étaient quand vous les avez transmises. On avait pris des précautions particulières à cet effet. L’avis donnée sur la matière par Monsieur le Directeur est le résultat de la communication des minutes faites confidentiellement par le pétitionnaire à qui on avait promis le secret.
Au surplus ce n'est point le cachet apposé sur ces pièces qui a été rompu, mais le filet qui était fixé par le cachet.
J'ai l'honneur de vous faire connaître qu'il a plu à Sa Majesté d'accorder la demande en obtention d'un brevet d'importation du sieur Zimmer-Wurth, demande qui faisait l'objet de votre dépêche cotée comme en marge, sous la modification, toutefois, que le terme de 10 ans, pour lequel le brevet est accordé commencera à courir dès le jour où ce brevet sera remis à l'intéressé.
En conformité de l'article 19 du règlement Royal du 26 mars 1817, il sera ouvert un registre au secrétariat général, dans lequel les brevets délivrés seront transcrits en entier, de même que les certificats de concession et de translation des droits ; que ce registre, confié à la garde du secrétaire général pourra être consulté par ceux qui se proposent de demander un brevet.
Cuve destinée à perfectionner la fabrication de la bière [4]
Epilogue
Cette notification se fera avant le 20 de ce mois, par la voie d'un agent de police qui en contrôlera le jour et l’heure ce dont vous rendrez compte.
En réponse à la dépêche du … nous avons l'honneur d'informer la Régence du pays royale grand-ducale, que le contenu de la dite dépêche a été notifié au sieur Zimmer-Wurth, brasseur à Clausen, le dit jour 22, à 3h de relevée, par un des agents de police de la ville, ce dont nous rendons compte par le présent.
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[2] It should be kept in mind that this patent application was the first one that the Luxembourg Government had to deal with after the creation of the Belgian state.
[3]This was an extraordinary statement: allowing a brevet d’importation to be granted for an invention that had not been patented outside the Grand-Duchy and, moreover, not belonging to applicant but to a third party!
[4] “Mathias Zimmer fabriquait un produit selon la méthode de la fermentation haute ou superficielle (Obergärung)”. - Jules Mersch - BNL - Fascicule 15 - page 181.
[5] Charles Zimmer, Census 1920 Alabama.
(21/02/2021)