Blanchiment et avivage [3] des glaces métallisées
Lorsqu’à laide d'une réaction chimique on dépose un métal blanc tel que l'argent sur une glace ou toute autre corps vitrifié, le métal qui forme le fond de la glace reflète bien l'image mais elle est terne et généralement jaune et sombre.
À la suite de nombreuses recherches, je suis arrivé à faire disparaître complètement cet inconvénient, en donnant aux glaces tout l’éclat de celles dites « au mercure ».
Pour arriver à ce résultat je procède comme suit:
Lorsqu’après avoir déposé de l'argent, du platine ou tous autres métaux blancs sur une glace on vernit le métal avec un vernis gomme laque, puis après avoir couché ladite glace on la couvre pendant environ une demi-heure d'une couche de liquide composée de la façon suivante:
- On fait dissoudre dans un litre d'eau 20 g de cyanure de potassium puis on ajoute du nitrate de mercure jusqu'à saturation, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'il se fasse un léger précipité.
- On additionne à ce liquide de l'acide acétique jusqu'à ce que le liquide fasse tourner le papier tournesol ou rouge. On ajoute alors cinq litres d'eau pour avoir six litres de liquide.
- On peut obtenir à peu près le même résultat en dissolvant le nitrate de mercure dans de l'eau ammoniacale puis en ajoutant de l'acide oxalique ou bien encore de l'acide tartrique. Je préfère cependant la première composition.
Quand la glace est bien avivée il faut la laver avec de l'eau ordinaire, la faire sécher puis la peindre ou bien encore coller une feuille d’étain; dans cet état, la glace a l'éclat de la glace dite « au mercure » et est inaltérable.
Des recherches ultérieures m'ont amené à me servir de la composition suivante, qui remplit complètement le but que je me suis proposé :
- Cyanure de mercure 400 g
- Eau distillée 5000 g
- Ammoniaque 200 g
- Oxalate d'ammoniaque 100 g
On commence par laver la glace avec de l'eau ammoniacale, puis on dilue 100 g du mélange précédent par litre d'eau, on le verse sur la glace, et on laisse séjourner pendant quelques minutes. On lave ensuite à grande eau.
Après avoir versé la dissolution de mercure sur la glace, je saupoudre sur le liquide à l'aide d'un tamis approprié, une poudre de zinc, qui est destinée à réduire le mercure en s’emparant de son acide.
De cette façon je produis un amalgame sans attaquer l'argent en évitant ainsi toute malfaçons dans le blanchiment et avivage des glaces.
La glace amalgamée a perdu la teinte jaune de l’argent pur; elle donne alors des images beaucoup plus blanches et comparables à celles des anciens miroirs; elle devient aussi bien moins attaquable par les vapeurs sulfurées et résiste parfaitement à l’action du soleil; sous ce dernier rapport, elle est aussi bien supérieure aux miroirs étamés, dont le tain s’altère sous l’influence prolongée de la lumière. Tels sont les résultats d’une expérience de deux années; les glaces expédiées aux colonies depuis l’époque où un habile miroitier de Paris, M. Maugin Lesur, a commencé l’exploitation du procédé Lenoir, n’ont été jusqu’ici l’objet d’aucune plainte; la traversée si périlleuse pour les autres ne les a nullement altérées: il en est de même de l’action du soleil expérimentée depuis le même temps !
Le procédé Lenoir, alors même que l'avenir révélerait quelques inconvénients méconnus, jusqu’ici, est donc réellement un progrès véritable sur les procédés actuellement en usage.
Objet de rapports entièrement favorables à la Société d’Encouragement (rapport publié par le Journal officiel), au Conseil des architectes de la ville de Paris, à la Société centrale des arohitectes.de France, à l’Académie des sciences, à la Société d’encouragement, au ministre de l’agriculture et du commerce au nom du Comité d’hygiène et de salubrité publiques, approuvé par une lettre de félicitations du ministre de l’agriculture, honoré du prix Monthyon décerné par l’Académie des sciences, d’une médaille d’argent à l’exposition de Compiègne (1877), etc., etc., etc., le procédé d’étamage créé par M. Lenoir a obtenu une récompense plus significative peut-être que toutes celles que nous venons d’énumérer: c’est la faveur croissante que lui accorde le public, faveur attestée par l’accroissement incessant de la production.
[1] FamilySearch database (KC86-FJP)