62 - Frédéric FISCHER Jr (1810 - 1871) (2) [1] [2] [3]

In 1847 FISCHER had discovered in Luxembourg a specific marble for use as lithographic substrates. He filed a patent application for his discovery, but he was unsuccessful (see No 31a).

On 24 July 1858 FISCHER made a second attempt to obtain a patent, by filing an application for an invention entitled:

Application des schistes, marnes et argiles bitumineux à la fabrication des briques et pierres artificielles (Fabrication de liquides de sels ammoniacaux de pierres artificielles et de ciments tirés des schistes, marnes et argiles bitumineux)

FISCHER wrote to Son Altesse Royale le Prince Henri des Pays-Bas:

Monseigneur, 

Le soussigné Frédéric Fischer jr, pharmacien et fabricant de gaz à Luxembourg, encouragé par les bienveillants conseils de votre Altesse Royale et par la sollicitude qu'elle porte à tout ce qui intéresse le progrès industriel dans le Grand-Duché, s’est livré depuis plusieurs mois à des recherches incessantes pour découvrir un procédé qui permette d'utiliser les marnes, argiles et schistes bitumineux dont plusieurs parties du pays contiennent des gisements immenses. 

Il pense que les peines n’auront pas été infructueuses et que les combinaisons qu'il est parvenu à déterminer, pourront faire fructifier un produit territorial resté sans valeur jusqu'aujourd'hui.

Pour récompense de ses travaux il demande le privilège d'exploiter exclusivement son procédé pendant 15 années et dépose à cet effet sa demande en brevet d'invention. 

Il supplie Votre Altesse Royale de daignier accueillir favorablement sa demande.

His letter was accompanied by a description of his invention, in which he explained:

Le but principal de mes procédés est de tirer des schistes, marnes et argiles bitumineux, de n'importe quelle couche de formation géologique, des liquides ammoniacaux pouvant servir d'engrais et à la fabrication de toutes les préparations et sels ammoniacaux connus dans l'industrie et le commerce;

secundo, d'employer les résidus de la combustion totale ou partielle desdites matière bitumineuses; 

de rendre enfin par ces moyens possible d’utiliser les dépôts des matières qui ont été négligées jusqu'à ce jour; 

de tirer de plus grands avantages de celles qui ont déjà été employées industriellement, et de créer une nouvelle industrie pour la fabrication de briques, de pierres artificielles et de ciments sans emploi de toute autre combustible. 

Dans le Grand-Duché lesdites matières n'avaient pas trouvé jusqu'aujourd'hui d'applications industrielles, quelques essais isolés, comme amendement de terres, exceptés.

The Chambre de commerce was instructed to examine the application on 28 July 1858. 

Ch. F. MERSCH and Fr. EYDT who acted as examiners for the Chambre de commerce reported on 15 October 1858:

La fabrication de produits ammoniacaux et de ciments ou pierres artificielles de forme quelconque, pour lesquelles l’inventeur demande à être breveté nous mérité d'être accueillie favorablement. Toutefois, nous pensons que la spécification de l'invention, telle qu'elle est décrite par le pétitionnaire, ne présente pas le degré de clarté nécessaire pour que l'on puisse, sans l'assistance du pétitionnaire lui-même, comprendre comment il parvient aux résultats qu'il revendique comme son invention.

L'inventeur déclare qu'il a trouvé le moyen 

1° de tirer des schistes, marnes et argiles bitumineux de n'importe quelle couche de formation géologique, des liquides ammoniacaux pouvant servir comme engrais et pour la fabrication de toutes les préparations et sels ammoniacaux connus dans l'industrie et le commerce.

2° dans l'emploi des résidus de la combustion totale ou partielle desdites matières bitumineuses de rendre par ces moyens possibles d’utiliser des dépôts naturels et de créer une nouvelle industrie pour la fabrication de briques, pierres artificielles et des ciments,  sans besoin d'autre combustible.

C'est-à-dire, que l'inventeur demande à être breveté pour la production de deux genres de produits industriels, mais extraits tous les deux des roches bitumineuses mentionnées.

Mais, obtient-t-il ces deux genres de produits par une seule et même opération, ou bien les obtient-t-il par deux opérations parfaitement distinctes? 

La description, fournie par l'inventeur, n'est pas assez explicite pour que nous puissions répondre à cette question. 

Si le pétitionnaire se propose de brûler sans admission de combustible (excepté par la première mise à feu) les roches bitumineuses ci-dessus mentionnées et d’utiliser, d'un côté, les résidus solides de cette combustion pour la fabrication de ciments et pierres artificielles; de l'autre côté les vapeurs ammoniacales qui se dégagent pendant cette combustion en les condensant pour les concentrer en eaux ammoniacales ou sels, il est clair à notre avis, qu'un brevet peut lui être accordé pour les ditess roches dans le but d'obtenir les deux genres de produits mentionnés dans sa demande de brevet.

Si au contraire la distillation dont il est question dans le passage suivant:

1° dans la condensation des liquides ammoniacaux de la distillation des matières en question pour être employé etc.

si, disons nous, cette distillation est une opération distincte de celle dont il est question plus haut et sous 2°, c'est-à-dire de la combustion sans addition de combustible, pour la production des résidus solides, il nous semble qu’un même brevet ne saurait comprendre deux objets aussi distincts, mais que chacun de ses objets devrait être le sujet d'un brevet spécial, quoique la matière à l'aide de laquelle ils sont obtenus soit la même; sans quoi on accorderait au pétitionnaire le droit exclusif à employer un don de la providence, au lieu de lui garantir le droit exclusif d'employer les procédés qu'il dit avoir découverts, pour retirer de ce produit naturel des produits marchands.

Dans tous les cas, il résulte des observations précédentes que, pour nous au moins, la description fournie par le pétitionnaire n'a pas cette clarté qui est regardée comme l'une des conditions les plus essentielles de la validité d'un brevet, et qu'il est à désirer, autant dans l'intérêt général que dans celui du pétitionnaire, que celui-ci formule la demande de manière à écarter le doute signalé ci-dessus, et qu'il fournisse une description « assez claire et complète pour que l'exécution de ses procédés soit possible, pour toute personne compétente, sans le concours de l’inventeur », et en y joignant au besoin des plans et des dessins nécessaires à la parfaite intelligence des procédés comme le demande la loi du 25 janvier 1817.

FISCHER received a copy of this report directly from the Chambre de commerce (was informed « brevi manu », see below) which prompted him to provide additional arguments in support of his application.

On 23 October 1858 he submitted the following document to the Chambre de commerce:

Note additionnelle et explicative à la demande de brevet d'invention faite le 24 juillet 1858 par Frédéric Fischer jr, pharmacien à Luxembourg

Après avoir pris connaissance des observations que Messieurs Ch. F. Mersch et F. Eydt, experts nommés pour examiner la demande prérappelée ont bien voulu me communiquer, j'ai l'honneur de vous transmettre les explications et compléments désirés par ces Messieurs.

Les cinq articles spécifiés dans ma demande forment une méthode à part et un ensemble d'opérations qui permettent d'utiliser les matières en question. 

Pendant que je calcine par l’air atmosphérique dans des foyers à forme cylindrique ou autre, les matières désignées dans ma demande aux dépens d'une partie ou de la totalité de la matière combustible y continue, sans admission d'autres combustibles que pour la première mise à feu, il se dégage par la chaleur produite par cette combustion une certaine quantité de matière volatile, comme sels ammoniacaux, huiles bitumineuses etc., que je recueille dans des appareils placés entre le foyer de la combustion et la cheminée ou autre sortie des gaz brûlés. Ces appareils de condensation seront identiques ou ressemblants à ceux qu'on emploie dans les fabrique de gaz, de noir animal, de sels ammoniacaux et autres, pour les utiliser à la fabrication de préparations et sels ammoniacaux, ou sous forme liquide ou solide, comme engrais artificiel.

Enfin j'emploie les résidus obtenus par cette opération de combustion et de distillation à la confection de briques, ciment, pierres artificielles etc., comme je l'ai exposé dans ma demande du 24 juillet. 

Je crois qu'il ressort clairement des explications qui précèdent que ma demande ne fait qu'un tout et une méthode à part qui présente, tant pour la nouveauté des détails des emplois, que de l'ensemble, matière pour l'obtention d'un brevet d'invention.

‍ J'entends me réserver les droits exclusifs sur le reste de ma demande de brevet prérappelée, si dans l'expérience en grand je me voyais forcé, pour insuffisance de bénéfices sur la fabrication d'eau ammoniacales ou sels ammoniacaux et d’huiles bitumineuses, d'abandonner cette partie de ma demande. 

Experts Ch. F. MERSCH et F. EYDT, in response to FISCHER’S additional note, issued a second, revised opinion on 10 November 1858:

Dans le rapport que nous vous avons eu l'honneur de vous adresser, en date du 15 octobre dernier, sur la demande en brevet d'invention du sieur Fr. Fischer jr, pharmacien à Luxembourg, nous nous sommes bornés à signaler le manque de clarté par lequel pêchait, suivant à nous, la rédaction de cette demande et des spécifications de la découverte, tout en reconnaissant que celle-ci nous paraissait de nature à être brevetée. 

Comme, par sa note additionnelle et explications, en date du 23 octobre, l'inventeur explique clairement l'invention pour laquelle il désire être breveté, nous croyons devoir faire quelques remarques sur la nouveauté de cette invention même.

« Il est de notoriété que, depuis assez longtemps, diverses personnes se sont occupées d'expériences sur nos roches bitumineuses, dans le but d'utiliser celles-ci, soit pour l'économie domestique, soit pour l'industrie; et il paraît même qu’une fabrique avait été établie pour l'extraction des liquides combustibles que fournit la distillation de ces roches. En surplus la note suivante que nous extrayons textuellement des annales de la société des sciences naturelles, pour l'année 1853, montre à peu près où en était la question à cette époque:

Note sur l'emploi du schiste comme combustible.

Après une suite d'expériences dont Monsieur de Prémorel rend compte dans plusieurs communications à la société, il est parvenu à brûler dans un fourneau de dimension ordinaire, le schiste bitumineux de Differdange. La température de l’appartement dans lequel a eu lieu l'épreuve a subi une élévation sensible après une heure de chauffage et de l’eau, exposé à l'action du foyer est entrée en ébullition. C'est résultats portent Monsieur de Prémorel à manifester l'espoir que l'on pourra utiliser le schiste ou chauffage des appartements et à la maison des légumes; il pense enfin que l'industrie pourra s'emparer de ce nouveau combustible dont le prix est presque nul, attendu la quantité incalculable qui en existe, et le peu de frais de son extraction. Monsieur de Prémorel engage la société à rechercher si du schiste, pris ailleurs et à diverses profondeurs, ne contiendrait pas plus de principes combustibles que celui extrait à Differdange. Il pense aussi que l'on pourrait utiliser les gaz qui s'échappent pendant la combustion du schiste.

Dans les environs de Sedan, l’usage du schiste naturel et brûlé est apprécié depuis plus de 40 ans; brûlé, il fait sous le nom de cendres de Flize, l'objet d'un commerce étendu. 

Il résulte évidemment de cette note que l'idée de brûler les schistes sans addition de combustible, et d’utiliser les gaz qui s’échappent pendant la combustion de ces substances ainsi que les résidus solides (cendres) de la même combustion n'est pas nouvelle. Mais d'un côté, rien ne prouve qu'en se servant du mot gaz, Monsieur de Prémorel ait voulu faire allusion aux vapeurs ammoniacales qui se dégagent pendant la combustion des schistes; de l'autre côté, les cendres ne paraissent avoir été employées que pour l'agriculture. »

L'existence de l'ammoniaque dans les schistes bitumineux, ou plutôt son dégagement pendant la combustion ou la distillation de ces substances avait toutefois été reconnue depuis longtemps et a donné lieu à de nombreuses recherches. Nous citerons entre autres celles que M. H. Vohl a entreprises avec le Posidonienschiefer du Würtenberg  et qui ont donné pour la composition d'un échantillon:

Theer                         7,63

Ammoniakwasser         8,33

Rückstand                 69,68

Gas                         12,36

‍                                              100,00

Il paraît, du reste, que depuis assez longtemps, la fabrication de l'ammoniaque et de sels ammoniacaux à l'aide de schistes bitumineux a cessé d'être une possibilité pour devenir une réalité. Voici ce que nous lisons dans le dictionnaire technologique qui se publie en ce moment :

« Bei der trockenen Destillation von bituminösen Thonschiefer geht eine ammoniakalische Flüssigkeit über, für deren Gewinnung dem Grafen Hompesch 1841 ein Patent verliehen wurde; er benutzt sie indessen zur Darstellung von Ammoniak-Salzen. »

Enfin, il est à notre connaissance, que les schistes bitumineux ont été calcinés dans le but de découvrir, si les produits solides de cette calcination ne pouvaient pas être utilisés pour la production de ciments. Des essais de ce genre ont eu lieu, entre autres, par des employés du chemin de fer de la section Bettembourg-Dudelange.

Il résulte de ce qui précède que l'invention du sieur Fischer n’est nouvelle, d'une manière absolue, dans aucune de ses parties; et que si nous avons cru néanmoins devoir déclarer dans notre premier rapport qu'elle mérite d'être brevetée, c'est que par l'ensemble du procédé elle est nouvelle; qu'elle n'existe pas à l'état d'industrie, chez nous, et que surtout la fabrication de ciment, briques et pierres artificielles à l'aide des résidus de combustion directe des schistes ne paraît pas encore avoir été montée comme industrie nulle part.

On 20 November 1858 the Chambre de commerce transmitted the opinion of its experts to the Government as follows:

Dans un rapport du 19 octobre dernier les experts, MM Ch. MERSCH et Fr. EYDT, ont reconnu qu'il y avait lieu d'accueillir favorablement la demande du sieur Fischer, mais ils ont trouvé insuffisantes les explications sur les procédés pour être utilisées en temps et lieu sans l'intervention du pétitionnaire.

Sur la communication de ces avis des experts qui a été faite brevi manu au sieur Fischer, celui-ci a fourni une note additionnelle et explicative des procédés qui a été renvoyée aux experts, lesquels, dans leur second rapport du 10 de ce mois, mentionnent des faits contestant la nouveauté des procédés, reconnaissent cependant qu'ils n'existaient pas comme un ensemble à l'état d'industrie et méritaient sous cette considération, d'être brevetés.

Notre collège est d'avis qu'il il y a lieu de récompenser les efforts du sieur Fischer pour employer sur une grande échelle des produits qui sont de tout temps disponibles dans notre sol, pour les convertir en produits commerciaux que peut-être nous pourrons fournir dorénavant aux pays étrangers d'où nous les avons tirés jusqu'ici, par l’attribution d'un brevet limité à la durée de 10 ans, pour l'ensemble de ses procédés de tirer des schistes, marnes et argiles bitumineux, des sels et des liquides ammoniacaux, de fabriquer avec les résidus de ces matières des pierres artificielles et du ciment.

The Government prepared the documents for issuing the patent and forwarded the patent certificate for signature to S.A.R. Monseigneur le Prince Henri on 2 November 1858, accompanied by the following cover letter:

La Chambre de commerce … ayant fait examiner cette demande par des experts … a proposé dans son rapport joint, sur l’avis desdits experts, d’accorder au pétitionnaire un brevet d’invention de dix années.

Le sieur Fischer ayant demandé un brevet de 15 années je ne pense pas que ce temps puisse être réduit sans son consentement, lequel il ne peut plus donner aujourd'hui qu'il a déjà obtenu des gouvernements de France [5] et de Belgique un brevet d'importation pour 15 années à partir du jour où il a déposé sa demande en obtention d'un brevet d'invention.

‍ Je suis en conséquence du très respectueux avis, Monseigneur, qu’il y a lieu d'accorder au sieur Fischer le brevet d'invention qu'il sollicite …

The patent was granted on 2 December 1858 for a duration of 15 years.

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[1] FamilySearch database

[2] Wikipedia

[3] Jos. A. Massard, Frédéric Fischer junior (1810 - 1871), pharmacien et fabricant de gaz d'éclairage à Luxembourg (212), (http://massard.info/pdf/FischerF.pdf)

[4] see also No 31a

[5] FR patent No 37,741

(06/02/2021)